1.3 Les monnaies locales : Auroracoin, Scotcoin, Pesobit, Franc noir, pesetacoin,…
L’engouement pour les monnaies locales est né en 2014. Beaucoup de crypto monnaies ont émergé à cette époque-là avec l’objectif de se positionner en opposition ou en complémentarité aux monnaies nationales ou supranationales avec toujours le même objectif, l’émancipation monétaire.
Cependant, ces monnaies ont beaucoup de mal à s’imposer comme de véritables alternatives. Je ne suis pas certain ,d’ailleurs, comparativement aux autres monnaies présentées précédemment qu’elles arriveront un jour à creuser leur sillon dans le paysage des crypto monnaies.
Concernant les méthodes d’analyse, celles-ci restent identiques aux autres monnaies mais il faut y ajouter pour moi deux critères essentiels que sont la situation économique et monétaire des pays en question et surtout la force de l’identité communautaire des populations. Je ne prêterais par exemple pas la même chance de réussite au franc noir (France) qu’à l’Auroracoin (Islande) ou au Pesobit (Philippines). N’oublions pas non plus que pendant encore quelque temps, le bitcoin jouera plus certainement le rôle de valeur refuge, comme on peut le voir actuellement avec les situations spécifiques de l’Inde et de la Chine. En effet, à l’heure actuelle et pour des questions de sécurité de placement, les gens auront toujours tendance à se positionner sur le bitcoin puisque celui-ci est présent depuis 2009, sa sécurité est éprouvée, son écosystème solide et il est aujourd’hui la porte d’entrée privilégiée dans l’acquisition des autres crypto monnaies.
Il y a donc à l’heure actuelle deux grands mouvements sur ces crypto monnaies, les crypto créées par des citoyens en vue de favoriser les échanges internationaux ou en complément des monnaies fiduciaires classiques et depuis peu des états souhaitent aussi créer leur propre crypto monnaie (Sénégal, Ukraine, Suède…) dans l’objectif de remplacer leur monnaie fiduciaire. Je préfère ne pas entrer dans la critique de telles initiatives tellement elles paraissent ne pas comprendre les fondements de la technologie et donc les champs de son application.
Ces crypto monnaies-là sont , à mes yeux, les plus compliquées à analyser. Même si les fondements restent les mêmes, cette mise à l’échelle nationale soulève plusieurs points d’interrogation :
– Des questions idéologiques nationales (législatif, communautaire, démocratique)
– Des réflexions sur le rôle des monnaies fiduciaires au niveau microéconomique et macroéconomique que je ne suis pas à même d’analyser étant donné la complexité de ce seul champ
– Des difficultés à avoir un réseau mondial à destination d’une population ciblée : des masses monétaires ajustées au risque d’une volatilité accrue ou une masse monétaire élevée afin de stabiliser les prix
– La sécurisation d’une monnaie qui aura un champ d’application plus restreint (dans l’idée), une adoption communautaire potentiellement moins importante et donc un déficit de sécurité ou de décentralisation
Ces initiatives sont donc très intéressantes à analyser et à suivre mais il est difficile de se projeter et donc très délicat d’investir au vu de tous les facteurs qui entrent en ligne de compte dans l’appréciation de leur devenir.
1.4 Les monnaies, quels devenirs ?
Il me semble important de pouvoir énoncer en guise de conclusion, les difficultés principales liées à la mise en œuvre plus généralisée de ces crypto monnaies.
Tout d’abord, même si nous l’avons juste évoqué en début d’article, la question technologique inhérente aux crypto monnaies est essentielle à comprendre ou tout du moins à cerner afin de se rendre compte des limites actuelles dans le processus de développement et de maturation de cette technologie. En résumant très grossièrement, le proof of work (POW) favorise la centralisation et encourage un gaspillage d’énergie très important mais fait preuve d’une grande sécurité. À contrario, le POS favorise la décentralisation et ne consomme que très peu d’énergie, mais ne peut garantir structurellement une sécurité aussi forte que le proof of work… Il est donc probable que le futur des crypto monnaies et par ailleurs de la technologie blockchain elle-même ne soit pas encore apparu ou que celui-ci pourra être implanté dans une crypto déjà existante, nous n’en savons rien… Les questions de sécurité se posent aussi dans l’usage qui peut en être fait avec les smartphones, tel qu’on l’a vu il y a peu de temps avec les applications de portefeuille bitcoin. (https://cointelegraph.com/news/watch-out-certain-android-mobile-devices-can-steal-your-bitcoin)
Pour en savoir plus, je vous conseille ce très bon article : http://blogchaincafe.com/264-2
Ensuite, un des freins le plus importants est celui de l’usage. Aux yeux des plus anciens de l’écosystème, les paiements en direct se développent, mais dans l’absolu cela reste un marché de niche. Et c’est seulement cette adoption par les foules dans un usage quotidien qui permettra une généralisation et un engouement plus important pour les crypto monnaies. Seulement, encore aujourd’hui, et cela vaut pratiquement pour toutes les crypto monnaies, l’axe marketing a une coloration encore très technique plus à même de convaincre les early adopters, ceux qui justement n’ont pas besoin d’être convaincus si ce n’est par la plus-value d’une technologie sur une autre… Et cela vaut aussi pour les développeurs qui construisent des logiciels majoritairement obscurs et éloignés des considérations des utilisateurs finaux. La crypto monnaie GULDEN est à ce titre très intéressante puisque leur vision est grandement axée sur l’expérience de l’utilisateur final. Il ne s’agit pas d’en faire la promotion ici, mais de souligner leur positionnement avant-gardiste dans le mouvement des crypto monnaies.
En clair, les crypto monnaies devraient être avant tout, pour les citoyens, un moyen d’émancipation des banques traditionnelles. Cela signifie qu’ils doivent être promoteurs de carte bancaire, de paiement par smartphone et de tout autre moyen à des fins d’utilisation dans l’économie réelle. Cependant à leur décharge, l’acceptation comme moyen de paiement traditionnel est beaucoup plus complexe à lever. Entre l’acceptation par les banques dont elles sont quelque part des concurrentes, le paiement par smartphone déjà peu développé pour les moyens de paiement traditionnels et peu ancré dans les mentalités et les acceptations juridiques et législatives, le chemin sera long et semé d’embûches.
C’est pourquoi le lobbying réalisé par le bitcoin, rejoint depuis par d’autres crypto, ouvrira le champ à l’ensemble des crypto monnaies présentes sur le marché depuis un moment. C’est à ce moment-là aussi qu’apparaitront les failles techniques lorsqu’elles celles-ci seront confrontées à des volumes et des enjeux financiers beaucoup plus importants qu’aujourd’hui.
Enfin, et ce sera le dernier point, la question de la gouvernance de ces projets est essentielle dans la longévité de ces crypto monnaies. Que ce soit le bitcoin, dash, gulden, blackcoin, vericoin, zcash pour ne citer que celles –là, aucune n’a une gouvernance similaire. Certaines ont un modèle associatif, d’autres un modèle entrepreneurial, d’autres hybrides, d’autres communautaires, et ces enjeux-là sont très importants dans la pérennité ou la capacité de résilience des différentes crypto monnaies.
C’est par ailleurs toute la difficulté du modèle économique des projets blockchain dans leur ensemble qui n’est pas encore vraiment résolu et que nous traiterons dans un autre article.
J’espère que cet article vous aura permis d’y voir un petit peu plus clair dans ce monde fou, mais merveilleux des crypto monnaies !!
« A l’heure actuelle et pour des questions de sécurité de placement, les gens auront toujours tendance à se positionner sur le bitcoin » Pas vraiment. Sa volatilité est beaucoup trop importante et fait principalement l’objet de spéculation. Son temps de transaction beaucoup trop élevé ainsi que son coût de transaction. Précurseur de la crypto-monnaie et publicité en ont fait sa principale réussite mais elle reste nettement moins intéressante que d’autres crypto comme le Ripple. Merci pour l’article.