Ce questionnement revient souvent au sujet des crypto monnaies. Les crypto monnaies sont-elles inscrites dans l’économie réelle ou pas ?
Tout d’abord je pense qu’il faut encore une fois distinguer les deux secteurs majeurs qui composent l’univers des crypto monnaies : les tokens d’entreprises qui souhaitent concurrencer des secteurs économiques grâce à la plus-value apportée par la blockchain et enfin les crypto monnaies dont le seul objectif est de servir un usage monétaire, qu’elles soient à vocation de protection de la vie privée ou pseudonyme telle que le bitcoin.
Pou rappel voici les quatre secteurs majeurs des crypto monnaies :
Les crypto monnaies infrastructures (Ethereum, Stratis, NEM, Lisk, ARK, Bitshares, NEO,…) [Blockchain autonome]
Les crypto monnaies à vocation monétaire (Bitcoin, Litecoin, Monero, Dash,…) [Blockchain autonome]
les crypto monnaies à vocation non monétaire (Gamecredits, BitBay, Syscoin, Steem, Siacoin, Nexus,…) [Blockchain autonome]
Les tokens (Actifs numériques adossés à une blockchain existante permettant la création de smart contract]
Token : représente un actif numérique crée par l’intermédiaire d’un smart contract dissocié d’une blockchain publique. « la frontière est mince entre un token et une cryptomonnaie ; même s’il est généralement admis que la seconde est émise par le protocole de consensus d’une blockchain publique alors que le premier en est dissocié. »
Pour plus de précisions , un très bon article se trouve ici : https://www.ethereum-france.com/qu-est-ce-qu-une-cryptomonnaie-token-bitcoin-ether-gnt-gno-dgd-plu-rep-rlc/
1. Dans projets d’entreprise à vocation non monétaire
Aujourd’hui beaucoup de ces projets sont en phase de test, soit en alpha, soit en bêta. Leur connexion avec l’économie réelle est donc pour l’instant minime. Il peut y avoir une différence fondamentale entre ces projets. Certains ont leur propre blockchain pour créer leur application, d’autres se basent sur des blockchain sécurisées et pré-existantes comme Ethereum, Waves ou Stratis pour ne citer qu’elles. Dans le second cas, on parle donc de token et pas de crypto monnaie.
Cette liste ne se veut pas exhaustive, mais parmi les projets déjà en production, on peut citer les projets suivants :
– Factom : La blockchain (basé sur bitcoin) fournit déjà des solutions pour les entreprises sur les questions de conformité, d’identité, d’actifs transparents et de gestion de titres.
– Siacoin/Storj : Sia et Storj ont déjà des solutions de stockage de données de façon décentralisé. Il est donc possible, soit de louer de l’espace disque disponible, soit d’acheter du stockage dans les nuages grâce à ces solutions technologiques.
– Augur/Gnosis : la plateforme de prédiction de marchés par la foule de Augur est en bêta pour le moment. Celle de Gnosis est encore à l’état de concept.
– Waves : La plateforme de crowdfunding de waves est déjà en fonctionnement sur l’aspect création de token. Il reste encore beaucoup de développement, mais le concept fondamental de Waves est en fonctionnement.
– BitBay : La plateforme de marché décentralisée (Ebay like) est opérationnelle. Des biens sont déjà en vente sur le logiciel dédié. Cependant l’offre est encore marginale et la technologie doit aujourd’hui être travaillée sur sa convivialité afin de simplifier l’accès à ce nouveau marché.
– Steem : le réseau social est fonctionnel et permet de rédiger des articles tout en étant rémunéré par la communauté selon la qualité et l’audience de nos articles. Cependant son historique sulfureux me questionne quant à la distribution équitable des votes et des pouvoirs dans la communauté.
– Lykke : La plateforme d’exchange décentralisée est fonctionnelle même si elle n’est pas encore au niveau des échanges centralisés tant en matière de fonctionnalité que de volume. Concernant Lykke, j’ai quand même des interrogations sur le fait qu’elle ne soit utilisable que sur smartphone, ce qui est pour moi un problème majeur en termes de sécurité et d’application.
Les autres projets en production, mais aux états d’avancement variés que nous pouvons citer sont :
NEM – LBRY – Ethereum (sur la partie crowdfunding) – maidsafe – Ripple – Stratis – Bitshares – Lisk – Iconomi – Counterparty/Omni – Bitcrystal/Nexium – Einsteinium – Syscoin
Si vous voulez avoir une connaissance plus élaborée de l’avancement de chacun de ces projets ou d’autres qui seraient en phase de test, vous pouvez, bien entendu approfondir vos recherches.
Beaucoup d’autres projets basés sur la blockchain sont encore en proof of concept, avec encore aucune mise en production auprès du grand public ou des entreprises, que ce soit en phase alpha ou bêta. La méfiance à l’égard de la capacité de ces entreprises à délivrer un produit fini, fonctionnel, adopté par les consommateurs et dont la blockchain procure un vrai avantage concurrentiel est effectivement légitime. Aujourd’hui, pour certains porteurs de projets, la blockchain et les levées de fonds par les ICO (initial coin offering) est aussi un moyen d’obtenir des fonds conséquents sans avoir à passer par les financements traditionnels qui sont plus regardants quant à la faisabilité du projet et sa capacité à pénétrer un secteur économique par une vraie innovation concurrentielle. Les ICO sont encore très peu règlementées, et c’est une des raisons pour lesquelles tant de projets font aujourd’hui appel à ce système sous couvert d’une utilisation parfois insubstantielle de la technologie blockchain.
On se retrouve donc aujourd’hui avec des sortes de licorne de la blockchain dont, même si la valorisation n’atteint pas forcement le milliard d’euros, ne repose même pas encore sur un modèle économique aussi fragile soit-il mais sur des promesses de modèles économiques basées elles-même sur un concept technologique non délivré et très souvent encore en phase de proof of concept..
Il faut donc prendre beaucoup de recul avant d’investir et il est nécessaire pour cela d’analyser chacun des projets sur le filtre économique, technologique et communautaire.
– Analyse du secteur économique visé
– Innovation et plus-value apportées par la technologie blockchain (gouvernance technologique, modèle économique)
– Rôle et utilité du jeton ou de la blockchain dans l’environnement économique et communautaire du projet
Vous pouvez aussi regarder cette grille de questions réalisée par Sébastien Meunier :
Plus le pourcentage de « yes » est élevé et plus l’utilité d’un modèle basé sur une blockchain est pertinent.
Vous trouverez également d’autres modèles à cette adresse :
https://medium.com/@sbmeunier/when-do-you-need-blockchain-decision-models-a5c40e7c9ba1
Une fois que ces différentes analyses sont effectuées, vous pouvez rentrer en détail dans le projet et l’analyser plus profondément.
2. Dans les projets monétaires :
– Projets monétaires à vocation spécifique
Les projets à vocation purement ou quasi exclusivement à usage monétaire constituent un marché différent dans les crypto monnaies. Par ailleurs, je tiens aussi à distinguer les projets dont l’usage se destine à un marché spécifique ou à une utilisation pour le moins circonscrite. Dans ces projets je citerais en exemple:
– Gamecredits : marché des jeux vidéos (avec création et intégration de plateformes existantes)
– Digibyte : interaction avec les jeux vidéo (gains par les jeux vidéo)
– Potcoin : marché du cannabis
– Reddcoin : marché de l’économie de l’attention (social payment)
Pourquoi créer une crypto monnaie spécifique à un marché quand toutes les crypto monnaies classiques pourront certainement un jour répondre à ce marché aussi et peut être avec moins de volatilité du prix. Qui peut le plus peut le moins !
Il ne s’agit pas d’être dans la négation de ces projets, puisque certains notamment Gamecredits ou potcoin, souhaitent créer un véritable univers économique et partenarial autour de ces marchés qui représentent un volume présent et futur très important, mais il me semble judicieux d’avoir toujours cette pensée quand on étudie des crypto monnaies qui ont un angle d’attaque très fort sur un segment de marché spécifique, surtout quand l’usage ou la finalité ne repose in fine, que sur un usage monétaire. La question du nombre de crypto monnaies qui seront amenées à s’imposer dans le futur, à l’existence ou non de crypto monnaie spécifique à des marchés conséquents ou avec un ancrage communautaire puissant et aux questions liées à la résolution des problèmes de volatilité dans le futur, sont autant d’indices et de projection personnelle qui peuvent vous permettre d’adhérer ou pas dans ces projets spécifiques.
– Projets monétaires à vocation globale
Concernant le reste des crypto monétaires, on peut citer en deux catégories différentes.
Monnaies non anonymes (ou pseudonyme) :
Bitcoin – Litecoin – Dogecoin – Decred – Gulden – Burst – Blitzcash
Monnaies anonymes :
Chacune d’entre elles utilise des technologies qui leur sont propres afin de permettre le maintien de la vie privée dans les transactions. Certaines technologies sont plus résistantes et obscures que d’autres, mais ce n’est pas le sujet.
Dash – Monero – Bytecoin – Zcash – Byteball – Komodo – Pivx – Blackcoin – Navcoin – Cloakcoin – Zcoin – Zclassic – Zencash
Même si l’application dans l’économie réelle reste encore dérisoire par rapport aux volumes mondiaux, les crypto monnaies commencent à se faire une place, le bitcoin en tête. Certains magasins acceptent déjà les paiements en bitcoin, on peut parler notamment du site venteprivé.com ou amazon avec le système « purse ». Vous trouverez une liste plus exhaustive sur ce lien : https://bitcoin.fr/depenser-ses-bitcoins/
Le Japon vient au 1er avril 2017 de légaliser le bitcoin comme moyen de paiement, et l’Australie a suivi, puisque la loi visant à légaliser le bitcoin a pris effet le 1er juillet 2017.
La Russie travaille sur une possible évolution similaire pour l’année 2018.
Ce qu’il est important de retenir c’est le mouvement d’ensemble et je pense qu’il sera bénéfique à un ensemble de crypto monnaies, pas seulement au bitcoin. Les crypto monnaies sont pour moi aujourd’hui une évolution naturelle des moyens de paiement, plus rapide, plus sécurisé et de pair à pair mais aussi une révolution économique en éliminant les tiers de confiance et en faisant baisser ce coût d’intermédiation. L’extension de l’internet appliquée au monde de la finance. Il est par ailleurs impossible d’arrêter le mouvement, à moins de prendre des mesures visant à fermer les plateformes d’échanges et tous moyens susceptibles de permettre aux gens d’acheter, de vendre ou d’utiliser des crypto monnaies dans l’économie réelle. Certains pays autoritaires prendront peut-être ce genre de mesures à l’échelle de leurs frontières, mais cela reviendrait au même que nationaliser une économie dans une économie mondialisée. Pour moi il est trop tard pour enrayer un mouvement devenu inéluctable, un écosystème est déjà en place et celui-ci représente un secteur économique important. Aujourd’hui la seule solution pour les états étant d’accompagner le mouvement en contrôlant les flux et notamment en sécurisant les impositions en fonction de la typologie utilisée pour définir le bitcoin et les autres crypto monnaies (actifs digitaux, monnaies numériques…).
Pour le reste l’avenir appartient aux crypto monnaies. Reste à savoir le nombre de crypto monnaies qui vont s’imposer. Est-ce qu’il y aura un véritable écosystème de crypto monnaies différentes où chaque pays ou communauté pourrait avoir sa préférence ? Difficile de le prédire, mais ce dont je ne doute pas c’est sur le fait que l’histoire est en marche.
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